(dernière modification : )

Le structuralisme

Retour sur le relativisme culturel

Il est pertinent de remettre en valeur les apports du relativisme culturel (et les effets des sciences sociales sur la société), notamment en ce qui a trait au racisme.

Lévi-Strauss

Plus personne ne se revendique aujourd’hui de Lévi-Strauss; celui-ci a néanmoins laissé des traces au sein de la discipline.

Schéma extrêment caricaturé, pour se situer sur l’échiquier idéologique:

Anthropologie sociale ----------- Anthropologie culturelle
(organisation politique)          (monde symbolique)

Universalisme -------------------- Particularisme
(positivisme)                      (romantisme)

------------------ Structuralisme? ------------------

On peut très bien travailler en anthropologie sociale tout en tirant des éléments symboliques – on se situe toujours entre les pôles (et notre position peut changer avec le temps1).

Pourquoi situer le structuralisme au centre?

Conceptualisations de la structure en sciences sociales

Utilisation descriptive: souligne le caractère systématique d’un agencement de la réalité sociale.

[…]

On ne peut étudier la sphère parentale sans étudier la sphère sacrée.

Alfred Reginald Radcliffe-Brown (1881-1955) est un tenant du structuro-fonctionnalisme. Objectif: trouver des grandes lois, étalibr des théories universalistes par des structures. Tout comme le fonctionnalisme, elle a beaucoup de difficulté à penser le changement (si une structure explique tout, pourquoi changerait-elle?).

La structure sociale

C’est un ensemble de relations sociales qui unit les individus. Elle est relativement pérenne (même si un enfant part, la famille existe toujours).

Objectif: comprendre les structures de parenté.

Méthodologie: recenser les structures de parenté, isoler les caractéristiques de chaque structure, puis les classer les unes par rapport aux autres, pour mettre à jour les principes structuraux récurrents.

(voir le schéma d’Evans-Pritchard)

Limites du structuro-fonctionnalisme

Claude Lévi-Strauss (1908-2009)

L’analyse structurale en linguistique et en anthropologie (1945)

Il établit les grands principes de ce qui deviendra le structuralisme.

Il s’inspire de la linguistique de Ferdinand de Saussure et de la méthode phonologique mise en œuvre par Troubetzkoy et Jakobson: étudier non les phénomènes conscients mais leurs infrastructures inconscientes.

Il propose de prendre les relations constitutifs d’un système comme base de l’analyse.

Après son séjour aux États-Unis, Lévi-Strauss ne voulait pas retourner en France (il a même postulé à Montréal, où il a été refusé parce qu’il était juif).

Lévi-Strauss a beaucoup marqué l’anthropologie sociale. Il s’est beaucoup basé sur la phonologie (structure des sons dans les langues) et la sémiologie saussurienne.

L’école de Prague distingue:

Aucune population humaine n’utilise l’ensemble des phonèmes disponibles. La structuration physique venant par l’apprentissage des sons n’est pas exploité à son plein potentiel (en français par exemple, on n’utilise pas les sifflements, alors qu’on le fait dans d’autres langues).

Lévi-Strauss ne suppose pas qu’il existe une structure dans la société, mais que les structures sont des outils pour nous aider à comprendre une culture.

Lévi-Strauss prône la généralité d’abord (modèles théoriques, voires spéculatifs), et la comparaison ensuite (vérification empirique).

C’est un positif pur et dur, s’inspirant fortement des sciences empiriques et des sciences exactes.

Les socialistes ne sont pas fiables pour expliquer comment fonctionne la société; l’observation participante sont inutiles, nous enferment dans le particularisme. La réalité n’est qu’apparente, donnant une illusion de la réalité.

Points en commun et divergences avec le structuro-fonctionnalisme

Tristes tropiques (1955)

C’est l’ouvrage le plus accessible et le plus lu de Lévi-Strauss.

Il a permis au grand public d’avoir accès à l’œuvre de Lévi-Strauss qui est, par ailleurs, beaucoup plus herméneutique.

Il commence par cette phrase:

Je hais les voyages et les explorateurs.

Lévi-Strauss semblerait avoir été très déçu de ses seules expériences de terrain, en découvrant que les gens sont finalement très similaires, avec des structures sociales et des comportements très semblables. Il cherchait de l’exotisme («jusqu’à l’extrême pointe de la sauvagerie»), alors qu’il n’y en avait pas.

Pour Lévi-Strauss, il y a du vrai dans le mythe du bon sauvage. Il a d’ailleurs érigé Rousseau en père de l’anthropologie.

On est très loin de l’optimisme épistémologique d’Evans-Pritchard.

Pour Lévi-Strauss, l’essentiel réside dans la parenté et le sacré.

Les structures élémentaires de la parenté (1949)

@exm faire et savoir lire un schéma de parenté.

Lévi-Straus reprend l’analyse de Radcliffe-Brown selon laquelle la relation oncle maternel-neuveu utérin est fonction du type de descendance.

Le schéma de Radcliffe-Brown ne tient pas, cela a été démontré à maintes reprises.

Échanges de femmes et prohibition de l’inceste

Pour Lévi-Strauss, ardent défenseur de la prohibition de l’inceste, l’interdiction force les individus à se tourner vers d’autres groupes (pour favoriser les échanges, la cohésion sociale, etc. – toujours de manière invisible, inconsciente, dans l’idée d’une méga-structure qui dépasse la compréhension consciente des individus ordinaires).

Bourdieu remet en cause les mariages préférentiels, notant qu’on en fait très peu et qu’on ne les fait pas pour renforcer les liens sociaux. Pour Bourdieu, il y a des stratégies matrimoniales qui sont institutionnalisées, très présentes au sein d’un groupe (où ce sont d’ailleurs plus souvent qu’autrement des gens de classe sociale similaire qui se marient, et non des gens de classes différentes).

La mythologie

Un mythe est un récit fondateur que les membres d’une société se transmette de génération en génération.

Lévi-Strauss cherche les structures de la pensée humaine. Il remarque que plusieurs mythes dans plusieurs endroits différents racontent finalement la même chose.

Malinowski expliquait le mythe en ce que celui-ci permettait le rituel.

Les mythes sont des récits imagés.

Le mythe culinaire de la découverte de la viande

Les femmes ont été échangées; en retour, les héros doivent donner de la nourriture en retour (mais ils refusent). En punition, les hommes sont transformés en cochon sauvage.

Le mythe d’apparition du feu

L’humain pris en haut d’une falaise est secouru par un jaguar, ce qui lui permet de ramener le feu aux humains.

Comparaison des mythes

Lévi-Strauss catégorise les mythes par des couples d’opposition (héros (figures animales bienveillantes) / humains).

Toute régularité observable peut être «expliquée» avec le structuralisme.

Bilan du travail réalisé par Lévi-Strauss

Les culturalistes retiendront des structuralistes leurs fondements sémiotiques (étude des signes).

Critiques du travail de Lévi-Strauss

Le mythe ne peut être réduit à «un simple message de l’architecture de l’esprit humain» (Mary Douglas, 1967).

Partir du préconçu, à partir de modèles théoriques purement intellectuels qui n’ont, au final, aucune utilité (pratique ou théorique).

Lévi-Strauss n’est plus cité aujourd’hui, mais il a permis à la discipline de prendre de nouvelles directions.

Pertinence de Lévi-Strauss aujourd’hui?

Il y a encore des structuralistes en France.

Idée de Lévi-Strauss: redonner à l’anthropologie un cadre, une certaine scientificité pour y croire (à une époque où l’anthropologie était en crise, délaissée par les autres disciplines).


  1. Pour Adrien Savolle, il est d’ailleurs souhaitable de changer de position au courant de ses études, en fonction des lectures, apprentissages et changements dans notre façon de penser. Retour ↩